Emma Mars - Castelletto, tome 1: Chiara

Dans les ruelles chatoyantes et décadentes de Venise, Chiara rêve à une autre vie. À la mort de sa mère, victime de la peste, elle est recueillie par une communauté de prostituées alors qu’elle n’est qu’une petite fille. Treize ans plus tard, elle vit elle aussi du commerce de ses charmes.

Belle, brillante et déterminée, Chiara économise dans l’espoir de se construire un avenir plus radieux. Mais la découverte de l’identité de son père va bouleverser ses plans et lui offrir ce qu’elle n’aurait jamais imaginé : le pouvoir.

Plus sulfureuse que jamais, la Cité des doges devient le décor rêvé de sa quête d’amour et de liberté.

 

Mon avis: 

 

C'est avec grand plaisir que j'ai plongé dans ce roman prometteur. L’époque, le lieu, l'intrigue, tout concourt à donner envie de le découvrir. 

 

Dans ce roman, l'auteure nous raconte la création d'un premier bordel, un bordel qui doit encadrer - voire parquer - les putains, rapporter de l'argent à la ville de Venise et endiguer une prostitution bien trop visible pour la ville connue pour son carnaval. On assiste à la machination des uns et des autres, c'est à celui qui en tirera le plus de profit, le tout en évoluant aux cotés de Chiara, une jeune putain qui tombe amoureuse de celui qu'il ne faut pas. 

 

J'ai beaucoup aimé le côté historique du roman. Sans lire les notes de l'auteure présentes à la fin du roman, on sent que les recherches ont été approfondies. Une immersion totale dans le monde de la prostitution qui nous éclaire sur le commerce de la chair, sa violence, les pouvoirs qui sont en jeux. Mais le monde de la prostitution n'est pas le seul univers exploité. En effet, la ville en elle-même est bien décrite, avec ses ruelles et la montée des eaux qui bouleverse les habitants, sans oublier les maladies comme la peste qui progresse avec les rats. Comme je l'ai dit, le bordel est mis en place et beaucoup de question sont posées: à qui profite les bénéfices ? Est-ce une maison close ou une prison ? Pourquoi encadrer les putains ? 

 

L'auteure s'attache à nous décrire chacun des personnages. Je l'avoue, au début, le panel de personnages m'a un peu effrayée, j'avais un peu de mal à les situer dans l'histoire, à les placer dans leurs rôles. Mais au fur et à mesure, tout s'est mis en place. Il y a ceux auxquels on s'attache, et ceux pour lesquels on éprouve de l'aversion. Entre le calculateur, le machiavélique, le cruel et le sentimental, chacun joue un rôle important, non négligeable. 

 

Ce qui est plaisant dans ce roman, c'est que nous n'avons pas qu'un seul point de vue. L'église et les putains s'opposent, nous avons donc les arguments des uns et des autres qui exposent à tour de rôle leurs intérêts. Et puis, pour ne pas donner un caractère trop scolaire au roman, il y a forcément une histoire d'amour. Chiara est notre héroïne, c'est à ses cotés que nous allons évoluer. Nous la découvrons simple putain, une très belle putain, qui donne satisfaction aux hommes qui passent dans son lit. Elle est assez admirable dans sa faculté de se détacher des hommes qu'elle croise tout en conservant un maximum de dignité. Elle rencontre Nicola, un prêtre. A première vue, leur amour est impossible, mais que serait une romance sans amour ?! Ils vont donc s'aimer et se détester, surtout Chiara, lorsqu'elle découvrira que Nicola joue un rôle dans la mise en place du bordel. Une histoire d'amour très sympathique même si, selon moi, les sentiments sont arrivés un peu trop rapidement. Cependant, les aléas qu'ils vont connaitre m'ont séduite, j'ai aimé les contradictions qui les habitent et les poussent à prendre certaines décisions. 

 

Si le roman retrace la création du bordel, il est aussi centré sur Chiara et ses origines. Fille d'une putain et d'un père inconnu, elle ne s’intéresse pas spécialement à son père jusqu'à ce qu'un événement la pousse à comprendre. C'est un peu mon regret: le résumé parle de son père mais en réalité, on ne le découvre que sur la fin. Disons les vingt ou trente dernières pages. Si bien que la fin nous laisse avec une certaine frustration car le roman évolue très positivement et le tome deux ne demande qu'à être découvert. 

 

Le rythme est adapté à la structure du roman: lent au début (mise en place de l'histoire) puis de plus en plus rapide, intense. La plume est fluide, tranchante parfois, proche du lecteur et plaisante à lire. Au fil des pages, Emma Mars a su retranscrire l'ambiance de l'époque, de la ville. Certes, je ne connais pas cette époque, il n'empêche qu'on a réellement l'impression d'y être tant le souci du détail est respecté. J'ai aimé courir auprès de Chiara dans une ruelle sombre ou naviguer dans les dédales des couloirs. 

 

Un grand merci aux Editions Charleston pour leur confiance. Il me tarde de plonger dans le tome 2 intitulé Nicola, un tome prometteur surtout quand on découvre la fin du premier volet. 

 

Note: 17/20

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