Marine Meyer - Et souviens toi que je t'attends

Est-il plus difficile d'aimer à quarante ans qu'à vingt ? Est-ce si différent ? Un homme et une femme se rencontrent à l'âge dit du milieu de la vie. Il aime et se dérobe ; elle l'attend et le lui dit. Rendre à l'intimité sa noblesse, son secret, sa fragilité : comment faire lorsque la vie quotidienne, l'opinion de l'Autre sont à ce point dominantes ?

Tel est le chemin que Marine Meyer nous invite à emprunter dans son premier livre, d'une écriture sensible mais sans la moindre sensiblerie, qui nous parle du sujet le plus banal et le plus extraordinaire du monde : l'amour.

 

Mon avis :

 

En refermant ce roman, j’avoue avoir ressenti un sentiment partagé. Autant j’ai aimé le thème et l’écriture, autant par moments, je ressentais une certaine lassitude.  

 

Cette femme aime follement un homme qui se détache d’elle quand bon lui semble. Il dicte les règles et la rend ainsi ultra dépendante de lui. Il est marié, a des enfants mais en aime une autre que sa femme. Et pour des raisons que j’avoue avoir eu un peu de mal à comprendre, il est capable de rester éloigner d’elle six mois durant. Et elle, elle s’accroche encore en toujours.

 

Au travers de ce texte, qui se présente sous la forme d’une lettre confession, la narratrice nous raconte des épisodes de cet amour quasi impossible qu’elle vit avec cet homme. Elle tente aussi de comprendre pourquoi il agit de cette façon, espère le comprendre lui en tant qu’homme, mais désire surtout qu’il largue sa femme pour la rejoindre elle, sa bouée. A la fin, elle le met même au défi : "C’est à toi désormais de savoir ce que tu vas faire de cela : pourras-tu supporter les signes d’amour que je t’envoie sans pouvoir y accéder de la façon dont tu le souhaiterais, seul, bien confortablement installé dans ton lit, sans le risque de la vraie rencontre ?"

 

Une écriture délicate pour traiter d’un sujet délicat : l’amour à 40 ans. Aimer à nouveau, accepter l’autre avec son passé, … Maniant des mots à la fois touchants, tendres et crus, la narratrice se confie et évoque cet amour qui la dévore. Un mélange subtil d’ivresse amoureuse et de retenue non pudique. Marine Meyer a réellement su trouver les mots justes pour écrire ce roman qui se lit facilement de par ses courts chapitres et sa fluidité. Cela dit, elle ne répond pas - selon moi - à la question initiale : est-ce plus facile d’aimer à quarante ans qu’à vingt ans ? A première vue, je dirais que non ! Quand on lit Et souviens-toi que je t’attends, sans précision de l’âge, il serait aisé de penser que notre narratrice a aussi bien vingt ans que quarante. Après tout, la dévotion, la dépendance, sont des faits que l’on trouve le plus souvent chez les jeunes couples, ceux qui vivent leurs premiers amours. Mais là, Marine Meyer met en scène des personnes âgées qui agissent un peu comme des adolescents. Donc finalement, ce n’est pas plus facile d’aimer à quarante ans qu’à vingt ans et il doit en être de même à soixante !

 

Je parlais d’une certaine lassitude ; elle s’explique par le fait que le roman manque de tonus, de rebondissements. La narratrice évoque un appel, un rendez-vous manqué, mais rien de surprenant, rien qui ne nous accroche réellement et qui nous laisserait avec une question : va-t-il quitter sa femme ? Une question que l’on se pose rapidement, mais qui ne s’ancre pas dans notre tête. Ceci dit, dans la mesure où le texte se présente comme une confession, on ne peut s’attendre à ce qu’il soit rythmé tel un roman. A ce propos, la façon dont il est écrit - si l’on excepte le style d’écriture pour lequel j’ai déjà donné mon avis - est excellente. J’aime beaucoup ce côté "lettre" ou "journal intime" qui permet à la narratrice de se confier réellement, jusque dans les moindres détails de son histoire d’amour. Sans honte ni retenue, elle se confie avec ce monologue touchant car teinté d’une sorte de désespoir. Combiné à une jolie écriture, ça nous offre un roman que l’on prend plaisir à lire malgré le manque de… péripéties ! Merci aux Éditions de l’Aube de m’avoir permis de découvrir cette auteur à la plume si sensible: "Cela fait un an et quatre mois que nous nous sommes écrit pour la première fois. Cela fait un an et trois mois que nous nous sommes vus pour la première fois. Cela fait un an et trois mois que nous avons fait l'amour pour la première fois. J'étais tout en blanc, nous étions dans la pénombre de ta chambre et c'était la première fois. Avec toi tout recommence à nouveau, la vie recommence à se remplir de vie, le soleil réchauffe mon corps comme jamais."

 

Note : 13/20

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Commentaires: 2
  • #1

    chavardes (lundi, 28 mars 2016 17:34)

    (commentaire du 17 octobre 2014, 03h17)
    J'ai lu d'une traite ce bref roman. Je le trouve très beau et très juste psychologiquement. Tantôt dans la peau de l'une ou l'autre, je ne me suis jamais ennuyé. La morale de l'histoire pourrait être, entre autres, cette phrase:" Qu'à l'àge que nous avons, qu'à tous les àges, l'amour est un miracle..." Qu'il soit donné à chacun de le vivre une fois au moins dans sa vie ! J'aimerais biensûr en dire plus une prochaine fois.
    Est-il possible de s'adresser directement à l'auteur ?

  • #2

    Les Mots de Gwen (lundi, 28 mars 2016 17:34)

    (commentaire du 17 octobre 2014, 16h43)
    Je garde un bon souvenir de cette lecture, surtout en ce qui concerne le style d'écriture. Avec l'amour comme thème, l'auteur ne peut que séduire les fans du genre, tout réside dans l'approche et la construction du texte.
    Je pense qu'il est possible de contacter l'auteur, à défaut sa maison d'édition qui peut faire passer le message: http://editionsdelaube.fr/