Sur la ligne 1, toujours. Mais une station plus loin, vers l'est. Les héros de Fleischman, longtemps, ont battu l'espace, hanté ce terroir inusable qu'est le Marais, périphérique à la sortie du métro Saint-Paul, cœur du monde, ombilic et épicentre des êtres et des choses.
Là, sur la ligne de ce recueil aux quatorze stations avec arrêts brefs, ils franchissent les colonnes d'Hercule et descendent à Bastille. Ils y hantent ces forêts obscures que sont les cinémas assaillis de Cinémascope et fleurant bon le shampoing à moquette, s'y croisent, s'y lient d'amour, rencontrent des héros de films débarqués de l'écran, Balzac en conseil marital, organisent des ventes de charité, pianotent du Gershwin, écrivent des livres sans importance, se font représentant en sous-bois tranquille. Avec la virtuosité d'un placier en merveilles, Fleischman nous offre quatorze contes urbains, autant de tableautins cocasses et fantastiques agrafés aux pans d'un manteau sans âge. Bastille, nouvelle Arcadie !
Mon avis :
Au travers de quatorze nouvelles, Cyrille Fleischman analyse, dissèque et critique les comportements humains : un régal de moquerie pour lequel je tiens à remercier les Editions Le Dilettante :-)
Riverains Rêveurs du métro Bastille n’est pas une histoire, mais quatorze nouvelles dont l’action se situe, à la fin des années 1950, quelque part autour de Bastille. Un lieu historiquement chargé puisque la Place de la Bastille est le symbole de la Révolution Française. Mais des révolutions, l’auteur va nous en raconter quelques-unes ! Des révolutions, des prises de bec, des conflits, … tous les travers de l’Homme passent entre les doigts de Cyrille Fleischman et ce dans le seul but de nous faire passer un agréable moment !
Écrire une nouvelle, ce n’est pas donné à tout le monde : en quelques pages, nous devons tout avoir du roman, à savoir une mise en place, un élément déclencheur, un ou deux rebondissements et un beau final. Cyrille Fleischman y arrive parfaitement et ce qui ajoute aux charmes de ces nouvelles, c’est qu’elles débutent toutes très naturellement - un mari et une femme qui se disputent à la sortie d’un cinéma, un homme qui s’ennuie lors d’une soirée, … - mais parfois, un élément "surnaturel" apparaît, mais apparaît si "naturellement" qu’il est parfaitement inclus dans l’histoire. Eh oui ! Cyrille Fleischman parvient à nous faire croire que Balzac peut bel et bien apparaître pour nous conseiller !
Alors, pour être honnête - et c’est là mon appréciation personnelle - certaines nouvelles de ce Paris magique m’ont davantage séduites que d’autres. Mais c’est normal, dans n’importe quel livre il y a des passages préférables à d’autres ! Ceci dit, chacune possède son univers, son charme, son histoire. C’est narrer d’une façon si fluide que l’on pourrait croire que Cyrille Fleischman était là, à se balader derrière ces personnes et n’a fait que relater sur papier ce qu’il voyait. Ce qui nous donne une écriture directe, franche et amusante : "Il ne tenait pas promesse ? Alors qu'il se considère maintenant – à l’instant – comme en apprentissage de solitude avant divorce !" ou encore : "Ça fit presque rire son interlocuteur. Enfin ça aurait pu s’il avait existé un diplôme pour apprendre à rire, se raisonna-t-il.". une véritable écriture d’observation !
Riverains rêveurs du métro Bastille, c’est 158 pages qui nous assurent un moment de détente et d’amusement. En le refermant, on se dit que l’auteur avait une vision acérée et a parfaitement su tourner à la dérision nos petits travers !
Note : 13/20
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