Marie Vareille - La dernière allumette

Depuis plus de vingt ans, Abigaëlle vit recluse dans un couvent en Bourgogne. Sa vie d’avant ? Elle l’a en grande partie oubliée. Elle est même incapable de se rappeler l’événement qui a fait basculer sa destinée et l’a poussée à se retirer du monde.

De loin, elle observe la vie parisienne de Gabriel, son grand frère, dont la brillante carrière d’artiste et l’imaginaire rempli de poésie sont encensés par la critique. Mais le jour où il rencontre la lumineuse Zoé et tombe sous son charme, Abigaëlle ne peut s’empêcher de trembler, car elle seule connaît vraiment son frère…

 

Mon avis : 

 

Marie Vareille est une auteure que j'apprécie. La finesse de sa plume, la justesse de ses mots, sa capacité à tenir le lecteur en haleine tout en lui livrant une histoire tantôt incroyable, tantôt touchante, toutes ces choses font d'elle une auteure à lire absolument. 

 

Désenchantées et Ainsi gèlent les bulles de savon ont été des coups de cœur. La dernière allumette n'est pas loin d'en être un, il passe près, très près, de ce qualificatif, mais il n'en demeure pas moins un roman qui bouleverse. 

 

Il va être difficile d'en parler sans trop en dire, j'espère y arriver ! 

 

Marie Vareille nous présente Abigaëlle, Gabriel, leurs parents, les psy, Zoé Boisjoli et sa sœur. Tous ces personnages évoluent et l'on découvre leurs vies au fil des pages. Ils ne sont pas lésés, on apprend à les connaître intimement, au plus profond d'eux-mêmes, leurs peurs et leurs espoirs, leurs craintes et leurs bonheurs. Le schéma narratif est très intéressant car selon différents points de vue. Par exemple, nous avons des chapitres qui sont issus du carnet d'Abigaëlle quand elle avait 10 ans, 11 ans, etc ; des chapitres qui relatent une séance psy, donc écrits selon le point de vue du médecin ; des chapitres contemporains qui sont narrés selon le point de vue d'Abigaëlle. Cette construction est importante et permet au lecteur de mieux connaître les protagonistes (de façon générale, c'est un fait avéré quand on lit des journaux intimes). On découvre donc le passé de Gabriel et sa sœur, le présent aussi. Tout cela semble décousu, mais on perçoit le lien sans arriver, malgré tout, à l'identifier. Cette façon de construire son récit, Marie Vareille l'a fait à merveille car on plonge dans les méandres du cerveau humain, sur bien des points. 

 

"Mais j'avais oublié qu'on ne peut se sentir en sécurité nulle part, quand on a passé son enfance à être terrifié par ceux qui auraient dû nous protéger."

 

Un des thèmes majeurs est la violence conjugale et les répercussions sur les enfants. En disant cela, je ne vais rien gâcher de votre lecture puisque ce sujet est abordé très rapidement. On comprend donc que ce thème est porteur de quelque chose, d'une réponse, mais on cherche, on cherche, et on se dit que si l'auteure nous ouvre les portes du cabinet d'un psy ou bien les pages d'un journal intime, c'est qu'il y a une raison. A nous de déceler laquelle. Je dois avouer qu'une "énigme" ne fut pas longue à résoudre, j'avais ma petite idée. L'autre, toutefois, fut magistralement dévoilée. Je dis magistralement car imagée, presque poétique. Marie Vareille illustre les propos de ses personnages via des images, elle poursuit jusqu'à la dernière page. Les dernières pages justement, celles que l'on dévore avec avidité tant les révélations explosent avec un retentissement incroyable et permettent de comprendre. 

 

La seconde partie est à la fois bouleversante et addictive. On lit un chapitre qui change la donne. Car oui, la première partie ne m'a pas vraiment emballée. Certainement car je ne voyais pas où voulait en venir l'auteure. Cependant, étant très admirative de sa plume, j'ai poursuivi ma lecture sans regret. Marie Vareille a su immerger son lecteur dans ce microcosme, nous perdre, nous faire douter, nous surprendre, nous faire frémir puisque la tension devient de plus en plus palpable. 

 

"Je suis comme les autres. Je ne suis qu'un tout petit maillon, ma vie n'est qu'une goutte d'eau dans l'océan qu'est l'histoire de l'humanité, aussi fragile et éphémère que la lumière fugitive d'une allumette qu'on craque et qui s'éteint. Je n'ai qu'un seul pouvoir : choisir de tourner le dos, de détourner les yeux ou choisir de tendre la main et faire un geste d'amour."

 

C'est assurément le point fort de ce roman : les émotions. On passe par une palette riche qui est crescendo. Des émotions d'une telle intensité, une intensité que l'on retrouve dans les mots, les phrases, la construction. Marie Vareille possède ce don de rythmer agréablement son récit, qu'il soit poétique ou cruel. La joie comme le drame, elle trouve le mot juste et nous rend accro. On perçoit les drames, on ne peut pas lâcher le livre, on veut savoir, connaître, apprendre. Ce roman, c'est la violence conjugale perçue à travers les yeux de deux enfants. Une claque émotionnelle dont l'apothéose est éclaboussant de tristesse. 

 

Note : 17/20

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Commentaires: 4
  • #1

    Les lectures de Marinette (samedi, 02 novembre 2024 10:23)

    Il y a eu beaucoup d'avis intéressants sur ce roman et le tien en fait partie, contribuant à me donner envie de le découvrir. Je l'ai offert à ma grand-mère pour son anniversaire il y a quelques mois, il faudrait que je lui emprunte :)

  • #2

    Les Mots de Gwen (dimanche, 03 novembre 2024 11:09)

    Je pense que tu prendras une sage décision en le lui empruntant ;-)

  • #3

    Laura (dimanche, 03 novembre 2024 15:10)

    J'ai adoré ce roman et j'adore cette autrice ! Clairement avec celui ci elle nous manipule et nous fait vivre 1000 émotions c'est terrible et magnifique à la fois !
    Si tu n'as pas encore lu la vie rêvée des chaussettes orphelines n'hésite pas ! Fonce !

  • #4

    Les Mots de Gwen (lundi, 04 novembre 2024 15:01)

    Lu et il fut un coup de cœur ;-)
    J'aime beaucoup aussi Marie Vareille et totalement d'accord, ce roman est magistralement mené !